
A la recherche d’un ordre international durable et d’ordres régionaux viables.
Séminaire international organisé par la Chaire de géopolitique appliquée, le 16 juin
Michel Foucher, titulaire de la chaire Géopolitique appliquée, organise un séminaire international "A la recherche d'un ordre international durable et d'ordres régionaux viables". Ce séminaire, organisé en partenariat avec Radio France Internationale, aura lieu à l'EHESS, 105 boulevard Raspail, 75006 Paris, Amphithéâtre François Furet.
Les tables rondes 3 et 4 seront animées par Marie-France Chatin, journaliste à RFI, et retransmises dans son émission Géopolitique - Le débat.
Réflexions introductives
Michel Foucher (géographe, ancien ambassadeur, titulaire de la chaire de géopolitique appliquée au Collège d’études mondiales, FMSH, Paris)
Le système international est en transition, et la diversité des termes utilisés (imprévisibilité et incertitudes, désordre et chaos, surprises et brouillage stratégiques, monde illisible) en témoigne. Idem pour la géométrie du monde : bipolaire, unipolaire, multipolaire, apolaire ?
Le système international ressemble à un mille-feuilles stratégique où se juxtaposent plusieurs équations régionales qui ont chacune leur logique de longue durée (surtout quand la dimension religieuse est convoquée, comme au Moyen Orient).
Ce constat d’une transition dans le système géopolitique mondial a été fait bien avant l’élection présidentielle américaine. Est-ce la fin, voulue par les électeurs des Etats-Unis, de la Pax Americana, qui a accompagné la mondialisation économique et les succès des pays émergents, à commencer par la Chine ?
Un premier accord peut se faire sur le fait que la puissance (occidentale) est relative. A la fois à cause de l’émergence d’Etats qui ont des politiques purement westphaliennes et du rôle accrue des sociétés civiles (opinions, ONG, firmes) dans les relations internationales.
La multiplication des conflits régionaux (75 identifiés par l’International Crisis Groupe en 2017) montre les limites des interventions diplomatiques ou militaires des puissances et des organisations internationales. Et l’on se tourne vers les nouvelles puissances régionales pour créer de la stabilité, pour installer des ordres régionaux. Mais les conflits sont tellement enchevêtrés et les guerres civiles internes tellement internationalisées (Afrique, Orient) que même les puissances régionales ne parviennent pas à imposer leur règlement.
Etablir un ordre peut passer par trois voies : la paix par l’équilibre, la paix par l’empire, la paix par la loi et le droit.
La première renvoie à Metternich et au concert européen. Un concert oriental (Iran, Arabie saoudite, Turquie, Israël) est-il envisageable, dès lors que les Etats-Unis se désengagent durablement ? « La paix par l’équilibre est compromise par le fait qu’il s’agit le plus souvent d’un équilibre global fait de déséquilibres soumis chacun à une dynamique propre, ce qui rend bien difficiles les partages ou les accords globaux » (Pierre Hassner) . Le concert des puissances régionales et plus globales est bloqué par leurs divergences d’intérêts et leur antagonisme.
La paix par la force, sur le modèle réaliste de Bismarck, trouve ses limites dans la capacité de résilience des mouvements politico-idéologiques armés (du Congo à la Syrie, du Yémen à l’Afghanistan, cimetière des empires) et la recrudescence des nationalismes dans un « monde néo-national ».1
La paix par la loi et le droit est battue en brèche par le contournement des règles (subversion des frontières, atteintes au droit de la guerre) et l’affaiblissement du multilatéralisme alors que le pouvoir des Etats se réduit. Et dans chaque système international se distingue une « relation de tension majeure » (Arnold Wolfers). En 2017, ces relations de tension se sont multipliées et les acteurs engagés sur plusieurs fronts ne semblent prêtes à aucun compromis, qui est pourtant la base de tout accord viable.
Détails
Colloque
EHESS
105 Boulevard Raspail | 75006 Paris
16 juin 2017 | 9h00-18h45
Entrée libre
Lors de ce séminaire international, nous examinerons d’abord les fondements théoriques du système international et régional, anciens et modernes, puis nous croiserons les analyses des grands acteurs internationaux (Europe, Orient, Asie, Afrique et Amérique latine) avant de nous demander : par quoi commencer ?
L’une des hypothèses que les participants au séminaire devrait discuter est de savoir s’il faut d’abord bâtir un ordre d’échelle régional dans les zones de tension majeure avant et afin de rebâtir un ordre international qui, selon le politiste français Pierre Hassner2, n’est pas, dans le domaine de la paix et de la sécurité, à l’ordre du jour
1 Vers un monde néo-national ? dialogues entre Bertrand Badie et Michel Foucher organisés par Gaïdz Minassian (CNRS éditions, mai 2017).
2 Pierre Hassner, Feu (sur) l’ordre international ? Revue Esprit, août-septembre 2014.
Programme
9h Ouverture : Olivier Bouin, directeur du Collège d’études mondiales et du réseau français des études avancées
9h15 Introduction : Michel Foucher, ancien ambassadeur, Chaire de géopolitique appliquée (FMSH), Paris
9h30-11h00 Table ronde 1 – Les anciens et les modernes
Modérateur : Michel Foucher
Metternich et l’invention du concert européen
Luigi Migliorini, Professeur à l’Université Orientale, Naples
Kissinger versus Brzezinski et après ?
Justin Vaïsse, Directeur du Centre d’analyse, de prévision et de stratégie du Ministère des affaires étrangères et du développement international, Paris
Le nouvel ordre international, vu de Pékin
Wang Ji Si, Président de l’Institut d’études internationales et stratégiques, Université de Pékin
Washington 2017 : la notion d’ordre international a-t-elle encore un sens ?
Alexandra de Hoop Scheffer, directrice, German Marshall Fund of the United States, Paris
11h30-12h45 Table ronde 2 – Quel ordre régional en Europe ?
Modérateur : Luigi Migliorini
La Russie et l’Europe
Andrei Kortunov, Conseil russe des affaires internationales, Moscou
L’ordre européen vu de Berlin
Hanns Maull, Stiftung für Wissenschatf und Politik, Berlin
L’ordre européen vu de Londres
Ian Bond, Ambassadeur, Director of Foreign Policy, Center for European Reform, Londres
14h00-15h00 Table ronde 3 – Les échelles de l’ordre et de la paix en Afrique et en Amérique latine
Modératrice : Marie France Chatin, journaliste à RFI, producteur de l’émission Géopolitique Le débat
Le panafricanisme, une voie d’avenir
Cheikh Tidiane Gadio, Président de l’Institut Panafricain de Stratégie, ancien ministre des affaires étrangères, Dakar
Les Etats d’Amérique latine et l’intégration régionale
Ernesto Ottone, ancien conseiller du Président Ricardo Lagos, Directeur de la chaire Globalisation et Démocratie, Université Diego Portales, Santiago de Chile, et chaire Destins mondiaux de l’Amérique Latine, Collège d’études mondiales, Paris
15h15-16h15 Table ronde 4 - L’Asie multipolaire ?
Modératrice : Marie France Chatin, journaliste à RFI, productrice de l’émission Géopolitique Le débat
Le Japon et la Chine en Asie
Nobutaka Miura, vice-président de la Maison Franco-Japonaise, Tokyo
New Delhi et l’Asie
Jean-Luc Racine, Directeur de recherche émérite au CNRS (Centre d'études de l'Inde et de l'Asie du sud de l'EHESS) et chercheur senior, Asia Centre, Paris
16h30-18h00 Table ronde 5 – Après les crises, quel ordre au Moyen Orient ?
Modérateur : Jean-Luc Racine
Le point de vue de Téhéran
Professeur Hamzeh Safavi, Directeur de l’Institute for Islamic World Futures Studies, Téhéran
Quel ordre régional au Moyen Orient ?
Agnès Levallois, maître de conférences à SciencesPo Paris et l’ENA, vice-présidente de l’iReMMO, membre du comité de rédaction de la revue Confluences Méditerranée, Paris
La Turquie, ambitions et réalités
Ali Kazancigil, Politologue, Revue Anatoli, Paris
Un système de sécurité collective au Moyen-Orient, est-il possible ?
Denis Bauchard, ancien ambassadeur en Jordanie et directeur pour l'Afrique du Nord et du Moyen-Orient au ministère des Affaires étrangères, Paris
18h00-18h30 Table ronde 6 – Débat général
- Les visions nationales sont-elles réconciliables ?
- Par quoi commencer ?
- Synthèse : Gaïdz Minassian, journaliste au Monde, service Débat, Paris
18h30-18h45 Conclusion : Michel Wieviorka, Président de la FMSH, Paris